À peine au creux de la première, il fut question de la deuxième, et pour cause : les vagues ça vogue en escadrilles ou ce ne sont pas des vagues. Une fois qu’on est pris dans la marée, chaque autre vague suivra ; amabilité de la Lune. Autant s’initier tout de suite à la planche, non pas de surf, mais de salut : terre ferme à jamais meuble sous nos pieds.
Le vocabulaire est important. Certains s’empressèrent d’arrimer la dynamique à une rengaine de plomb, tuteur pour l’insouciant : « Vous n’y pensez pas, c’est la deuxième vague ! ». D’autres, pour inonder moins sans doute, eurent l’indulgence de l’euphémisme, nous accordant tantôt « réplique », tantôt « rebond » ou « épisode ». On restait dans le même registre ; il n’y eut personne pour suggérer « tuyau de poêle ».
Différentes écoles s’écharpèrent à la télé. Les postillons de la polémique, s’accumulant sous les masques qui les entravaient, formaient des filets gouttant des mentons sur les pupitres ; les débattants bavaient. Certains allèrent jusqu’à nier le phénomène, refusant même de le désigner, et n’en voulurent pas démordre avant qu’enflât la statistique. Quand enfin la courbure épousa la métaphore majoritaire, alors seulement ils capitulèrent. Rien n’arrête la deuxième vague.
Pour s’en prémunir, on avait pris des mesures. Il fallait s’enduire régulièrement les mains d’un gel poisseux (drôle d’idée de la propreté). Les plus lascifs se massaient les doigts après l’étreinte du métro, et les plus nerveux, punis d’avoir effleuré un bouton d’ascenseur, s’écorchaient la peau. En tout cas chacun promenait son petit flacon. J’ai même vu un jour un type le porter à sa bouche, mais à son œil grivois, j’ai soupçonné que c’était de la gnole.
Last modified: 8 novembre 2021