Le besoin de savoir l’emportant sur ma hantise des médecins et des examens, alerté aussi par un nouveau symptôme en la personne d’un fourmillement intempestif au niveau du pouce et de l’index droits, je m’en fus consulter à mon retour de vacances avec, à la clé, la confirmation d’une suspicion de névralgie cervicobrachiale et la prescription subséquente de séances de kiné — le thérapeute très bonhomme chez qui j’allai mit vite en cause ma posture au travail, en quoi il n’avait pas complètement tort : fini donc non seulement de travailler avachi dans le fond de mon fauteuil au bureau, mais fini aussi d’écrire avachi, mon ordi sur les genoux, dans le fond de mon canapé à la maison le soir, la pratique de la littérature, même occulte, s’avérant en l’occurrence non exempte de tout danger physique ; en bon élève j’acquis illico clavier et souris sans fil plus un support pour surélever mon laptop jusqu’à la hauteur de mes yeux, le tout formant ainsi une station informatique à l’ergonomie optimale dont je dois avouer n’être pas peu fier — ainsi que, par acquit de conscience, d’une IRM pour dépister une éventuelle hernie discale (cette dernière pouvant, comme je l’avais lu, causer la névralgie, ainsi que je l’indiquai à la jeune interne qui remplaçait ce jour-là mon médecin traitant, lui rapportant mes anxieuses recherches en ligne ; bien sûr je ne lui apprenais rien, même si elle me trouva sans doute un brin catastrophiste).
Direction donc le centre d’imagerie médicale, ultra-moderne sauf quand il s’agit de pratiquer le tiers payant : j’en fus quitte pour une avance rondelette. Avant de m’introduire, étendu de tout mon long sur la couche dure et blanche comme l’émail, dans la bobine supraconductrice qui ressemble à s’y méprendre à un cercueil, s’avisant que c’était pour moi une grande première, le jeune technicien s’employa à me rassurer : vous verrez, ce n’est rien, si ce n’est que ça fait un bruit équivalent en décibels à celui d’un marteau-piqueur (sous-entendu : sous lequel donc vous mettriez la tête). Il me faudrait tenir bon dix minutes durant. Je fermai les yeux, m’appliquai à ma respiration et me chantai des chansons. Verdict lapidaire ensuite rendu par une doctoresse peu concernée par mon si banal cas, qui me reprocha même d’avoir bougé pendant que pilonnait le marteau-piqueur, car elle trouvait les images peu nettes (elle mit cela sur le compte de la claustrophobie alors que c’était surtout à cause de l’inconfort, mais peut-être est-ce la même chose) : j’étais bien affligé d’une hernie discale, au niveau d’un certain disque intervertébral, maudit cartilage fibreux, en vertu de quoi elle ne trouva rien de mieux que de me déconseiller de me mettre à la boxe. Elle ne croyait d’ailleurs pas si bien dire puisque je sortis de là un peu groggy : m’avait-on décoché un uppercut ?
Last modified: 13 septembre 2024
