Réchauffement
Le vieil industriel, issu d’un sang noble révolu et cramponné par atavisme à l’ancienne étiquette, vouait aux gémonies tout ce qu’il voyait passer d’hommes en shorts, bermudas, chemisettes, claquettes, tongs et autres fripes décadentes révélant les chairs. L’homme occidental qui se respecte doit aller en manches longues, chaussures fermées et pantalon.
Post-mortem
Désespérant qu’on le publie de son vivant, l’écrivain à l’estime de soi excessive ne doutait pas un instant que la gloire posthume arrivât ; il écrivit jusqu’à ce que mort s’ensuive.
Hélas, personne ne sut jamais rien de ses textes, qu’un accès de paranoïa l’avait fait jalousement enterrer dans son jardin.
Discours de crise
À quoi bon écrire encore des romans ? Il n’y aura jamais plus d’auteur important, tous les écrivains mémorables sont déjà passés. L’histoire de la littérature est celle d’un temps révolu. C’est une mourante sous perfusion médiatique de cérémonies masturbatoires. Un cadavre pourri, que rongent des vers imposteurs.
Le bel art sied mal au goût mesquin de la démocratie qui ordonne de flatter sans condition les bas instincts du tout-venant ; ça fait beaucoup de censeurs à qui complaire à la fois. Beaucoup d’auteurs aussi : d’où vient qu’on publie tant de livres chaque année ? À croire que les écrivains excèdent en nombre leurs lecteurs.