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Rafraîchir la page pour tuer le temps
Ne me demandez pas comment je suis tombé là-dessus, mais en fait non, je m’en vais vous le dire, comment, c’était dans le flux vidéo d’Instagram, réseau social où je suis strictement dormant, passif, voyeur même, me cantonnant à voir sans jamais rien montrer, non pas tant d’ailleurs pour reluquer sournoisement ce qu’y publient les quelques amis que j’y suis encore comme par défaut — puisque étant passif, de longue date je ne m’abonne plus à personne, il n’y a donc plus grand-chose à voir par chez moi, et ce n’est pas très à la mode non plus, le vent siffle tandis qu’un fétu de paille tourbillonne sur la plaine, encéphalogramme plat que trouble seul, de loin en loin, quelque barbant tableau de vacances — mais pour dériver plutôt, meublant l’impulsif ennui de l’homo connectus, au gré des suggestions de la page de recherche, infiniment rafraîchie par simple application d’une pression du pouce vers le bas.
Continue ReadingLes Mouettes
2014 : première inscription en club de natation amateur aux Mouettes de Paris, dans le 19ème. Des forcenés ; les entraîneurs comme les entraînés. Les premiers, quasi des sergents instructeurs avec des biscotos larges comme ma cuisse (le plus musclé d’entre eux était aussi le plus idiot, comme quoi ces deux grandeurs-là ont finalement peut-être entre elles quelque proportionnalité). Sévissant un temps à Pailleron, bassin de trente-trois mètres pour faire durer le plaisir (on n’en voit pas le bout), puis à Georges Hermant, cinquante mètres, heureusement divisé en deux (sauf pendant les semaines de vacances scolaires, que je redoutais pour cette raison ; et quel plaisir pourtant, quelle glissade, comprendrais-je aussi bientôt, d’aligner cinquante mètres d’une traite, quand on a la cadence).
Continue ReadingPapillon
La nage papillon, telle que la pratique l’amateur, ressemble plutôt à s’y méprendre à celle du crapaud cul-de-jatte qu’empoisserait une flaque de pétrole.
Du papillon, on ne reconnaît à la rigueur que l’enfance larvaire et sa laborieuse reptation, quand il était encore chenille.
Continue ReadingLes écrivains pourraient s’introduire en bourse
Les écrivains pourraient s’introduire en bourse, moyennant une levée de fonds ; enfin cotés, ils se tireraient la bourre comme des Sociétés Anonymes. Autant d’actions mises en circulation que d’exemplaires imprimés des œuvres, à répartir entre pléthore d’actionnaires, du petit porteur, simple amateur de boursicotage, jusqu’au trader à haute fréquence (à condition d’écouler tous les titres émis, sans quoi gare à ce que le cours ne chute). On acquerrait non seulement ses exemplaires, mais un droit de propriété sur une parcelle du capital littéraire, à faire fructifier à long terme (peut-être pourrait-on même se rendre maître d’un orteil, d’un mollet ou d’une touffe de poils de l’auteur).
Continue ReadingDepuis un recoin de la littérature…
À propos du Sanatorium au croque-mort de Bruno Schulz, traduction de Thérèse Douchy, Allan Kosko, Georges Sidre et Suzanne Arlet, dans la collection L’imaginaire de Gallimard
Difficile de résumer d’un mot le style de ces nouvelles de Bruno Schulz réunies sous le titre de la plus kafkaïenne d’entre elles, qui fait aussi penser au troublant roman du méconnu Hermann Kasack, La ville au-delà du fleuve, tant porteur de promesses d’ailleurs, celui-là, que sa fin laisse un peu le lecteur (en tout cas moi) sur sa faim, justement— à cause même peut-être de son twist, efficace mais banalisé depuis par Hollywood, presque convenu aux yeux des post-modernes épuisés que nous sommes (tel personnage qu’on croyait vivant (bien que très bizarrement vivant) depuis le début s’avère en fait mort, hantant une sorte de réalité parallèle).
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