Mother! de Darren Aronofsky
(Spoiler alert !)
Sous prétexte d’allégorie baroque, sans trame ni contexte, sur les dommages collatéraux de l’égoïsme, incarné-là par le Génie Littéraire (sic) sous les traits granitiques — profil orthogonal de statue grecque — d’un Javiem Bardem outrageusement mâle, baudruche enflée de testostérone, le film se vautre gratuitement dans une putasserie sordide.
Subvertir la superstructure
Dès lors qu’on travaille en entreprise, irrémédiablement pris dans l’absurde enchevêtrement économique de clients, partenaires, collègues, employés, subalternes, fournisseurs, prestataires, managers, directeurs, patrons et chefaillons en tous genres, on n’est plus qu’un rouage microscopique de la superstructure capitaliste, et l’on ne s’appartient plus.
C’est hors d’elle qu’il faut travailler pour s’appartenir, et contre elle pour la subvertir.
Cimentation
Gorgé de soi par accumulation du moi au fil des ans, l’homme perd en capacité d’écoute à mesure qu’il vieillit. L’attention à l’égard de l’autre, que favorise l’indétermination poreuse de la jeunesse, disparaît au profit du sentiment unilatéral de sa propre importance, hermétiquement consolidé comme un ciment.
Réchauffement
Le vieil industriel, issu d’un sang noble révolu et cramponné par atavisme à l’ancienne étiquette, vouait aux gémonies tout ce qu’il voyait passer d’hommes en shorts, bermudas, chemisettes, claquettes, tongs et autres fripes décadentes révélant les chairs. L’homme occidental qui se respecte doit aller en manches longues, chaussures fermées et pantalon.
Post-mortem
Désespérant qu’on le publie de son vivant, l’écrivain à l’estime de soi excessive ne doutait pas un instant que la gloire posthume arrivât ; il écrivit jusqu’à ce que mort s’ensuive.
Hélas, personne ne sut jamais rien de ses textes, qu’un accès de paranoïa l’avait fait jalousement enterrer dans son jardin.
Discours de crise
À quoi bon écrire encore des romans ? Il n’y aura jamais plus d’auteur important, tous les écrivains mémorables sont déjà passés. L’histoire de la littérature est celle d’un temps révolu. C’est une mourante sous perfusion médiatique de cérémonies masturbatoires. Un cadavre pourri, que rongent des vers imposteurs.
Le bel art sied mal au goût mesquin de la démocratie qui ordonne de flatter sans condition les bas instincts du tout-venant ; ça fait beaucoup de censeurs à qui complaire à la fois. Beaucoup d’auteurs aussi : d’où vient qu’on publie tant de livres chaque année ? À croire que les écrivains excèdent en nombre leurs lecteurs.