J’étouffe de patauger dans la médiocrité, oui, et je crois mériter mieux. Mieux pour ma vocation littéraire, mort-née depuis près de vingt ans que j’écris, non pas morte pour moi qui la maintiens vive en mon royaume, qui la poursuis de mon obsession pugnace — quand des amis me demandent de loin en loin si j’écris toujours, je leur réponds toujours : « jusqu’à ce que mort s’ensuive » — mais mort-née du côté du public, parce que l’infâme et moutonnier sérail ne m’a jamais donné ma chance, que je ne jouis pas de la moindre reconnaissance — je dirais même : existence —, et parce que je sais pourtant valoir tellement mieux — au diable la modestie : qui le dira, si ce n’est moi ? — mais quelle chance a-t-on dans cette vie de vraiment trouver la place qui de droit pourtant nous revient ? Il doit même y avoir quelque part quelqu’un qui, la mienne, me l’a volée : qu’on me désigne l’usurpateur ! Je ne demande pourtant pas grand-chose, ni prix ni postérité garantie, seulement le loisir d’écrire mes livres, et une tribune pour les faire lire.
Last modified: 12 décembre 2023