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Publier mon livre m’a valu l’inimitié d’un vieux copain
Lorsque j’ai décidé d’autoéditer mon roman, j’ai dû envisager tous les moyens d’en faire la promotion, bien que ce fût là l’aspect de l’entreprise qui me rebutât le plus. Mais je ne me faisais pas d’illusions : personne ne s’en chargerait à ma place, et sans ça, mes exemplaires finiraient tous au pilon (j’avais opté pour un mode d’édition traditionnel qui ferait la part belle à la qualité du livre — ce qui implique du stock — plutôt que pour l’impression à la demande façon Amazon, avec son rendu bas de gamme).
Continue ReadingRaconter une histoire
Résumé de l’épisode précédent : où l’auteur s’en prend aux algorithmes.
Mais — assez cogné. Si tant est qu’on me lise, je n’échapperai pas à la critique : « Stratégie de distinction ! Comme Gombrowicz ! Comme tout le monde ! » — opposera-t-on à ma thèse illuminée. Comme Gombrowicz, peut-être ; comme tout le monde : sûrement pas. Car ici je prêche pour moi seul — alentour, aucune chapelle à défendre, aucun mouvement, aucun cénacle — mon désert ; une affaire entre mon lecteur virtuel, la littérature et moi.
Littérature du futur, ou le règne de la quantité
Il se veut d’ailleurs à la pointe de la technique mais apparaît dépassé. Plus jeunes et baignant dans le code, ses émules rendent enfin pleinement effectif le concept d’« écriture sans écriture », grâce aux algorithmes.
L’écriture sans écriture
Dans une sorte de mouvement contraposé, on trouvera les mêmes qui s’appliquent d’un côté à déprécier la valeur de toute tradition artistique, plaidant avec zèle de l’autre pour qu’on hisse au rang d’art : le jeu vidéo — on comprend d’ailleurs mal à quoi bon, puisqu’une fois celui-ci consacré, il faudrait implacablement le démolir ?
La sociologie contre la littérature
Il est une discipline que caractérise une pratique autonome de l’écriture aux antipodes de la démarche littéraire (science et vérité d’un côté, art et fiction de l’autre) mais sœur dans l’intention (saisir le phénomène) : la sociologie, actuellement portée par une corporation qui, pour certains de ses courants, aime à nier la singularité de l’œuvre de génie. Des sociologues qui disposent parfois d’une audience importante en ligne, incarnant de ce fait une tendance.
Roman de genre et genre du roman
Résumé de l’épisode précédent : où l’auteur n’est pas tendre avec les faux poètes du web.
On pourra reprocher à l’angélique corporation des poètes de produire n’importe comment du verbe surnuméraire, bon à rien, mais certes non pas d’être vénale, quoique on ne lui en voudrait pas d’être un peu moins prodigue de ses talents. Ce sera plutôt le cas, dans un style volontiers pragmatique, de tous les boutiquiers de l’autoédition qui se revendiquent parfois, pour faire sérieux, de la « littérature spéculative » qu’on appelle aussi, m’informe Wikipédia, la « paralittérature » — serait-elle à la littérature ce qu’est à la pharmacie la parapharmacie : un ersatz inoffensif ? — et qui comprendrait en fait les genres suivants, m’apprend-on encore : le roman d’aventure, le roman policier, le roman de gare, la science-fiction, le roman à l’eau de rose ou encore la littérature de colportage (le prospectus Picard bourrant nonchalamment ma boîte aux lettres relève-t-il officiellement de cette dernière catégorie ?). La littérature spéculative, en somme, c’est de la bonne vieille série B.
Poésie Open Bar
Commençons par faire leur sort aux poètes. Twitter grouille d’aspirants poètes, ou mieux : de soupirants poètes, ah ça oui qui soupirent, et se pâment d’extase dégoulinante en d’atroces vers de mirliton. Odes à l’amitié, à l’amour, aux jolies fleurs et aux p’tits zozios, ou noirs cantiques gémissant le malheur du monde, gavés selon d’espoir ou de désespoir, de liberté ou de fatalité, et d’autres ectoplasmes grandioses ; grosses ficelles et vocabulaire ampoulé, de rimes pauvres en allitérations atterrantes, d’anaphores balourdes en acrostiches puérils, littéralité pataude un jour et charabia insensé le lendemain, il y en a pour tous les goûts à la cour des miracles élégiaques.
Le marigot 2.0 de la post-littérature
Résumé de l’épisode précédent : où l’auteur prend la décision d’autoéditer son dernier roman.
Alors, parallèlement à cette démarche en gestation, j’ai souhaité être lu et tenter de me faire modestement connaître ; je me suis donc mis à rendre certains de mes textes publics, par les moyens qu’offre au moins l’époque, sans l’intermédiaire du livre, comme écrivain virtuel à destination d’un public tout aussi virtuel. Puisant dans un stock auquel j’ai désormais peu le temps de pourvoir, je publie donc au compte-goutte sur mon site (ici même) des notes du journal que je tiens depuis 2016 — site que j’ai mis en ligne moi-même avec mes petites mains prolongées d’un clavier commandant des applicatifs qui ont fait le travail pour moi, puisque comment ça marche, au fond, je n’en sais rien, et pourtant ça marche, c’est merveilleux, et c’est bien en cela que les machines nous contrôlent.
Trois romans deux-cents manuscrits
Cela fait plus ou moins douze ans que j’écris, au sens d’écrire pour de vrai — une fois passé l’âge de la prose égotiste au style bouffi — l’esprit animé d’une conviction (d’aucuns diraient lubie) proprement littéraire, s’affirmant au gré des lectures, de l’expérience du travail et de la pratique de l’imagination. J’écris sous diverses formes : des nouvelles, des récits d’anecdotes ou de voyages, des journaux, des textes brefs de toutes sortes (contes, aphorismes, portraits etc.) et bien sûr, des romans. Jusqu’ici, trois romans.